J20 - Covid-J19 ?

Homme qui a foiré son tuto masque.

(Sans lien direct avec ce billet. Ça me fait marrer, c'est tout.)

7 h 00

Aaaaargh ! Ma têêêêêêêête !!! Aaaaaaaaargh !

Je veux mourir.

8 h 00

Est-ce que je suis vivante ?

C'est ça le purgatoire ?

8 h 15

J'ai même pas la force de me pincer.

8 h 30

J'ai chaud. J'ai froid. Je transpire. Est-ce la fièvre (du samedi matin) ?

8 h 45

Si je pense, est-ce que je suis donc ?

(Trop de Star Wars ces derniers jours ont regardé les enfants...)

9 h 00

Qui qui c'est qui me met une lampe de la Gestapo dans la face ?

9 h 05

Vomir. Vite.

9 h 06

Ça, c'était bien réel.

Je suis toujours en vie.

9 h 07

Pas vomir sur le chemin retour vers la chambre. Pas vomir.

9 h 10

Pas vomir sur le chemin aller vers les toilettes. Pas vomir.

9 h 15

Faille spatio-temporelle.

12 h 00

Qui me crève les yeux avec des tisonniers ?

Est-ce que j'ai mérité ça ?

Je ne suis sortie qu'une fois par jour, avec mon attestation remplie en bonne et due forme, horodatée et signée de ma belle main.

Je n'ai pas emmené les enfants à la Biocoop où ils sont interdits, à l'instar des chiens.

Hier soir, je me suis appliquée à chanter Renaud comme une gamelle au Karaoké (ou était-ce Axelle Red ?) (Je m'embrouille parce que l'Ado fait parfaitement les deux voix.) et j'ai suivi à la lettre la chorégraphie de la Macarena avec les mioches.

Puis j'ai rendu hommage à nos stars des années 80 en visionnant sur YouTube des clips de Jeanne Mas, Elsa, Stéphanie de Monaco. On pensait qu'à faire de la thune, à trouver une mini jupe en skaï et avoir la coupe de Bonnie Tyler, c'était le bon temps. (J'étais jeune.)

Ce billet sent déjà la honte. Mais assumée.

12 h 05

Visite.
- Eh l'Ado, quand tu seras chez toi tu feras ce que tu voudras mais là on mange.
- Pas faim, chéri. Dormir. Vomir.


13 h 00
Est-ce que j'ai mérité ça ?

(Si t'as pas envie de lire de l'amertume, saute ce passage et va à 13 h 30.)

Je fais tout bien comme il faut depuis le début du confinement.

Je m'efforce de culpabiliser à donf de mal le vivre. On me dit que c'est pas la Shoah (utiliser une comparaison si ignoble me fait gerber à nouveau) ou que je suis pas coincée au fond d'une mine. Un peu comme tu grognerais à un gosse qu'il a pas le droit de pas aimer les choux de Bruxelles à l'ail alors qu'il y a tant de mômes qui meurent de faim dans le monde. Petit con !

On devrait mettre en place une Police des Émotions, tiens !

- Police syndiquée des Émotions, bonjour ! Votre Attestation de situation perso s'il vous plaît. Bon toi, t'es autorisé à ressentir ça. Toi, objectivement, tu peux pas broyer du noir. 

Simplicité, efficacité.

En fait, tu sais quoi ?

On devrait être trop contents de ce qui nous arrive. Parce qu'on t'explique également en long et en large que c'est l'occasion de se recentrer sur l'essentiel (Procréer, manger, déféquer. Regarder la télé ?) - comme si on avait tous une existence naze et désincarnée - et d'en ressortir une réflexion puissante sur soi, sa vie, son oeuvre.
Attends, faut le rentabiliser, le faire fructifier tout ce temps offert !

Sinon il n'aura servi à rien ce virus. (sic)

Ben si quand même... à faire crever plein de gens dans l'inhumanité la plus abjecte.

On parle de solidarité, certes.
La preuve, l'Ado avec ses douze BD de Geluck dans les bras m'a demandé jeudi devant les cabinets, si je voulais passer avant lui. Je ne l'en remercierai jamais assez.

C'est rassurant.

En contrepartie je n'ai jamais lu autant de manque d'empathie. Tous à se juger les uns les autres. Chacun à voir les choses à son échelle, comme un politicard.

13 h 30

(C'est là où tu peux reprendre ta lecture.)

Avec du recul, chacun se gère et se rassure comme il peut...

Soyons unis, mes sœurs. Soyons unis, mes frères.

Aidons-nous, ne nous donnons pas de leçons.

Restons à l'écoute de toutes les souffrances. Ou pourquoi pas des joies.

Amen.

Oui, amène-moi de la flotte, je suis déshydratée.

14 h 00

Mal partout.

14 h 30

Est-ce que j'ai mérité ça ?

Je me laisse pas aller, je fais du sport sur un tapis de yoga avec des marques de dents de lait et j'essaie d'apprendre la langue que la petite A. invente et modifie en permanence. (Cette gamine est un génie.)

Demain je changerai de pull et je troquerai mon jean informe contre un jogging informe aussi ; ce qui fera dire à M. le Mari "Tu crois qu'il faut que je me commande un survêt' Adidas pour être assorti à toi ?".

15 h 00

Je ne peux plus bouger.

15 h 30
Visite.
- Maman, t'as même pas mangé ce midi, t'as le Covid-19 ?
- Non Choupinet, j'ai la Cuvée-19.
(19/20 sur l'échelle de la cuite.)

La honte, 10e étape de l'ivresse. Celle qui lave la colère. Ou l'angoisse ? Ou l'absence d'intimité ? Ou je sais pas quoi. 
Pourtant la soirée avait vraiment commencé sous les meilleurs auspices. Bien qu'un apéro sans la Grande, c'est pas vraiment un apéro...

Et si t'es pas jouasse, je te merde. Avec bienveillance, naturellement.